Chez les paysans du Nord Caraïbe, la solidarité était le maitre mot pour permettre leur survie et celle de leur famille. Après l’abolition de l’esclavage en 1848, la paysannerie du Nord Caraïbe était une population de gens de couleurs avec des moyens financiers limités. L’utilisation de charrues ne pouvait être envisagée pour leur labour. Car leurs exploitations se situaient généralement à flanc de montagne dans les zones les plus pentues. Il fallait donc envisager une autre solution et c'est de là que vient le ' lasotè '
Pour pouvoir labourer leurs champs, ils se sont regroupés en ' société ', dans le but de s’entraider et de donner un coup de main par solidarité, afin que chacun puisse voir ses terres labourées.
Avec le lasoté comme principe de fonctionnement, il s’agissait par exemple de labourer et sillonner les terres, damer la terre, récolter du manioc pour en faire de la farine de manioc, scier les troncs d’arbres, mais aussi de glacer les fèves de cacao après les avoir séchés.
Le lasotè est donc le nom que l'on donne aux travaux de labour. Quand dans la communauté on parle de lasotè, on sait immédiatement qu’il s’agira de labourer les terres d’un ou de plusieurs membres de la communauté. Le travail est ponctué par le son des tambours et les voix des chanteurs. Une vraie osmose !
Trois rythmes principaux indiquent chacun un type de travail précis :
Chaque type d’entraide porte un nom différent selon les travaux à réaliser. Les principaux 'coups de mains' sont :
Il s’agit d’une tradition riche d’enseignements et de leçons. Le lasotè n’est pas qu’une tradition, c’est surtout une leçon sur l’entraide et la solidarité. Ce patrimoine immatériel rural du Nord-Caraïbes a souvent été dévalorisé au profit d’une éducation urbaine marquée par un individualisme exacerbé.
C'est aussi un signe de respect à la terre, un acte d’honneur pour la terre qui donne tout et nourrit tout le monde. C’est à la fois un savoir-faire, un savoir-être, une cohésion sociale et un modèle économique.
Les systèmes d’entraide se sont étiolés du fait de l’exode rural dans les années soixante et soixante-dix. Cependant, des poches de résistance ont subsisté, particulièrement au quartier Piton dans les communes de Fonds Saint Denis, du Carbet, du Morne-Vert, au quartier Verrier à Bellefontaine et aux quartiers Démarche et Terreville à Schoelcher.
Ce n’est qu’en avril 2008, à Fonds-Saint-Denis, suite à des rencontres entre anciens et jeunes agriculteurs qu’est né le désir de remettre au goût du jour les différents types d’entraide.
Ces rencontres se sont formalisées par la création d’une association au nom de 'LASOTE'